Négocier dans les marchés publics, mode d’emploi
Les acheteurs publics ont depuis 2016 plus de souplesse pour recourir à la négociation dans leurs marchés. En quoi consiste-t-elle, quand est-elle possible, quelles formes prend-elle ?
Hadrien Toussaint, chef de service Achats à la Direction des Achats et des Affaires Juridiques du SDEA d’Alsace-Moselle, nous en indique les grandes règles.
En quoi consiste la négociation dans les marchés publics ?
On peut définir la négociation comme une discussion ou un échange afin de trouver un accord, ce qui peut impliquer des concessions réciproques.
Dans le cadre spécifique de la commande publique, l’acheteur peut négocier afin de faire évoluer l’offre initiale du candidat dans un sens qui sera plus proche de ses intérêts. Il peut en échange faire des concessions sur certains points du contrat..
Quels types de marchés sont ouverts à la négociation ? Sur quels aspects porte-t-elle ?
La négociation est autorisée pour certaines procédures formalisées et dans les marchés à procédures adaptées, ou MAPA, dont le formalisme offre une certaine souplesse. Mais tous les MAPA ne sont pas ouverts à la négociation ! Il faut s’assurer que dans le règlement de consultation figurent à la fois la décision ou la possibilité de négocier, le choix des candidats admis à la procédure et éventuellement, le contenu de la négociation.
Ensuite, il faut étudier de près ce qu’annonce l’acheteur dans le cahier des charges, car celui-ci peut contenir des éléments ouverts ou fermés. Prenons l’exemple du délai, qui est classiquement sujet à négociation :
- « La prestation doit être réalisée en x semaines » signifie qu’une offre qui en prévoit davantage sera irrégulière, car la condition de mise en concurrence entre les candidats est liée au délai. La condition est ici fermée, pas de négociation possible.
- « La prestation doit être réalisée en x semaines maximum » ouvre une discussion. Le candidat qui présente par exemple un prix élevé mais avec un délai plus court laisse ici une marge de négociation. En effet, si le candidat intéresse l’acheteur, celui-ci peut lui proposer de rallonger le délai, en contrepartie d’un effort financier.
La négociation peut aussi intervenir sur la partie technique de la réponse. Dans le cas d’un marché portant sur l’acquisition d’une machine, la discussion peut être initiée sur les questions des consommables, du contrat de maintenance, etc.
Dans tous les cas, le but de l’acheteur est de faire en sorte que le marché corresponde le plus parfaitement possible à son besoin : la négociation est donc importante pour une gestion vertueuse des deniers publics qui évitera le plus possible les avenants.
Comment se déroule la négociation ?
La négociation intervient après la première analyse des offres et avant l’attribution du marché. Elle peut avoir lieu par échange de mails via le profil acheteur, ou en réunion avec les candidats sélectionnés (leur nombre est souvent annoncé dans le règlement de la consultation).
Les candidats peuvent également signaler des difficultés à répondre aux demandes exprimées ou même faire des propositions. Ceci peut être fait lors de la consultation ou directement dans le mémoire technique avec une éventuelle contre-proposition.
Pendant la consultation, si la question d’un candidat est susceptible d’intéresser et de concerner tout le monde, celle-ci est rendue anonyme et la réponse est envoyée à tous via le profil acheteur : il est donc essentiel de s’identifier au moment du téléchargement du dossier de consultation afin d’obtenir ces informations.
Quels sont vos conseils pour négocier efficacement ?
Afin de laisser la porte ouverte à la négociation, le candidat peut :
- Enrichir la décomposition des prix demandée par l’acheteur, pour lui permettre de mieux comprendre leur construction et pour éviter une négociation sur le seul montant total,
- Signaler dans son offre les points sur lesquels il peut s’améliorer ou améliorer le cahier des charges,
- Proposer d’augmenter le pourcentage de l’avance ou d’ajuster les autres clauses financières du marché, ce qui améliorera sa trésorerie et rendra donc un effort possible sur le prix.
En revanche, conserver une marge de négociation peut être risqué, car à l’issue de la première analyse des offres, le candidat peut ne pas être retenu parmi les candidats admis à négocier, si le montant qu’il annonce est trop élevé par rapport aux autres.
La négociation est donc un aspect aujourd’hui très courant dans les marchés publics. Les candidats peuvent et doivent donc en tenir compte.